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Le Trail l'Ardéchois

57 km  ~  D 2450+/2450-
         Dimanche 7 mai 2006, 7h30. Nous arrivons à Desaignes et le ciel est couvert. Il a plu toute la journée d’hier mais le  charcutier du village nous a assuré qu’il ne pleuvait jamais deux jours de suite en Ardèche. La suite nous prouvera qu’il ne faut jamais écouter la météo des charcutiers… Je suis avec mes copains Michel, Yves et Didier, les mêmes qu’aux Templiers 2005. Yves a mal au dos et a décidé de ne pas courir. En revanche, il a quand même tenu à nous accompagner malgré sa frustration et c’est là une grande marque d’amitié. La dernière demi-heure est plutôt silencieuse pour les habituels chambreurs que nous sommes. La demi-heure de concentration. Nous avons en commun le fait de peu courir de compétitions dans l’année et cela donne à chacune d’entre-elle un caractère particulièrement évenementiel.
A 8h00, le starter nous libère et nous commençons par un tour du village avant d’attaquer directement la montée. La course elle-même, c’est un seul dossard et le choix au 28ème kilomètre de bifurquer pour s’arrêter à 34 ou de continuer sur 57 km. Là, tout le monde est parti tellement vite que j’ai l’impression d’être le seul à vouloir faire 57…
  Je m’efforce de ne pas trop m’occuper des autres (c’est dur…) et de laisser chauffer mon diesel. Pendant les 10 premiers kilomètres, la montée est quasi continue en sous-bois. Je me rends compte que certains partis si vite doivent débuter en trail car ils s’étonnent après seulement une demi-heure de ne pas voir la fin du sommet. Ils semblent avoir pris l’Ardéchois pour Paris-Versailles ! De mon côté, j’essaye de trouver mon rythme et mes sensations et j’ai du mal. Comme à chaque fois. Je suis un coureur que la première heure de course déprime ! Toujours trop vite, trop de monde, trop chaud…
La première heure passée, il me semble que ça accélère encore. Je repense à ce que j’ai baptisé pour l’avoir moi-même vécue ‘’l’euphorie de la deuxième heure’’. Ce moment où beaucoup de coureurs ne se sentent plus tenus par l’obligation de partir doucement, sont bien chauds, et se laissent emporter en oubliant ce qui reste à parcourir, euphorie qui bien entendu se paye cher par la suite. Et puis il y en a sûrement une majorité qui a décidé de s’arrêter à 34. Alors je serre les dents pour être raisonnable et je me fais doubler en permanence.
Je rumine : « Laisse-les ces chiens fous Steph. Tu les ramasseras plus tard…’’.
Je discute un peu avec un Jurassien très sympa dont le physique de bûcheron me laisse perplexe. Il est costaud mais il monte bien et plutôt en souplesse.
Vers le 14ème kilomètre commence la descente de la citadelle (1200m) vers Darne Bessac (650m) avec au passage les célèbres ruines du château malheureusement dans le brouillard. La descente, bien que roulante, n’est pas facile car elle comporte beaucoup d’herbes et de pierres que la pluie des deniers jours a rendu glissantes. Prudence donc. Nous sommes dans la troisième heure et je commence à peine à me sentir bien. Je me dis que je dois vraiment être fait pour le long !
Nous remontons ensuite sèchement de 650 à 1000m vers St-Jean Roure où une portion de replat oblige à relancer. Ceux qui sont montés dans le rouge commencent à souffrir et peinent à courir. Nous arrivons bientôt au premier ravitaillement. 22ème kilomètre. Je reste fidèle à mon habituelle stratégie du moindre arrêt et je me contente de remplir mon camel-bag, d’échanger quelques mots avec Yves et de repartir.  Comme souvent, beaucoup de coureurs restent scotchés au ravito. Je préfère me restaurer en marchant un peu plus, tranquillement, tout en continuant à avancer vers le sommet. Alors que je repars, un petit chien de berger qui était couché sur le bord du chemin se lève, s’étire, et commence à trottiner à mes côtés.
Au km 25 commence une longue descente de près de 10 km, ponctuée au 28ème par la bifurcation pour ceux qui veulent se limiter à 34 km. Bien sûr, ça chahute un peu. Un pauvre garçon qui est arrêté devant le panneau de bifurcation et qui visiblement se demande quelle option il doit choisir se fait chambrer sur sa virilité ! Il n’y a pas que des poètes dans les pelotons de trailers !
Je me sens particulièrement bien et je fais une super descente qui me permet de sortir du petit groupe avec lequel j’étais depuis le ravitaillement et de les lâcher. C’est et cela va rester un grand motif de satisfaction sur cette course. J’avais tellement souffert dans les descentes des Templiers que j’ai beaucoup travaillé sur ce sujet au cours des derniers mois : musculation excentrique en salle l’hiver dernier puis séances spécifiques de descentes au printemps. J’ai en fait remplacé toutes les traditionnelles séances de côtes par des séances de descentes. Et aujourd’hui ça paye, techniquement comme musculairement.
Au ravitaillement du 34ème kilomètre, Yves m’annonce que Michel et Didier qui ne se sentaient pas dans un grand jour ont décidé de ne pas forcer et de faire une course plaisir en restant tous les deux. A la sortie du ravito, j’engage la conversation avec un coureur de Savigny-sur-Orge. Nous ferons les onze bornes de montagnes russes suivantes ensemble, ou plutôt en yoyo. Il a des bâtons et me met une valise dans les montées, mais je le rattrappe et lui fausse compagnie à chaque descente. Nous nous motivons mutuellement et nous bouclons les onze kilomètres séparant les ravitaillements en 55’! J’ai des jambes de feu et moi qui suis en général un piètre compétiteur (plutôt le genre qui perd ses moyens), je vais connaître durant les deux dernières heures de course un véritable état de grâce. Je ne fais plus que remonter et doubler des coureurs, je parviens à courir là où les autres marchent, je dévale les pentes sans le moindre signe de crampes.
Il s’est mis à pleuvoir et je trouve ça assez rafraîchissant. De toute façon, le sol était déjà trempé.
Les dix derniers kilomètres de la course se décomposent en environ sept de descente continue puis trois de plat. Je finis par lâcher mon copain de Savigny dans la descente. Il ne reviendra plus. Les 3 derniers kilomètres paraissent longs. Ils n’apparaissent pas clairement sur le profil en coupe fourni par l’organisation et sont de plus à découvert, en bord de rivière et à travers champs. J’ai sauté le ravito du 52ème , ça m’a permis de passer trois gars, et de rentrer dans les cinquante. En me voyant passer, ils ont visiblement écourté leur pause et je sais qu’ils sont 100 mètres derrière. Je suis au taquet. Je ne me retourne pas mais au détour d’un virage, je vois que j’ai creusé l’écart. Une dernière côte pour rentrer dans le village. J’entends le speaker qui annonce mon nom et ma ville. Les derniers encouragements des spectateurs. Moi, l’éternel déçu des courses, le champion du monde de l’entraînement, j’ai trouvé ma course référence. 7h00’33’’ alors que je visais 7h30’. 48ème au scratch. 22ème SH.
Et surtout une deuxième moitié courue 1,3 km/h plus vite que la première. Place au boeuf en broche !
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J’oublie presque de parler de mon alimentation tant elle se fait discrète mais efficace. Boisson neutre, barres, tucs et noix. Une formule maintes fois répétée à l’entraînement. Pas la moindre ampoule non plus contrairement aux courses précédentes. Cette fois-ci, je me suis préparé les pieds au nok les dernières semaines mais le jour J, j’ai suivi les conseils de ceux qui sur le forum de Bruno Heubi préconisaient du talc pour éviter les risques de macération. Autre chose, je cours non pas avec des chaussures de trail dont aucun modèle ne m’a jamais pleinement satisfait, mais avec des chaussures de route. Le résultat est que je ne glisse pas plus que les autres mais que je profite d’un meilleur confort et que je n’ai plus l’impression de courir avec des sabots dès que le sol est un peu dur ou qu’il y a quelques hectomètres de bitume.